Les fondements de la théorie atomique


L'histoire des sciences



Philosophes, scientifiques se sont toujours posé la question de la discontinuité de la matière. LEUCIPPE (490-430 av. J.C.) puis son élève DÉMOCRITE (460-390 av. J.C.) ont développé un véritable matérialisme atomiste "Si tout corps est divisible à l'infini, ou bien il ne restera rien ou il restera quelque chose. Dans le premier cas la matière n'aurait qu'une existence virtuelle, dans l'autre se pose la question: que reste-t-il? La réponse la plus logique, c'est l'existence d'éléments réels, indivisibles et insécables, appelés donc atomes."


PLATON puis ARISTOTE pensaient autrement et à part quelques épisodes, il faut attendre le 17° siècle pour disposer de moyens propres à étayer ou à réfuter les idées sur cette question.

VAN HELMONT (1577-1644) de Bruxelles conteste Aristote, l'astrologie et DESCARTES. Il utilise le premier la balance, (connue depuis l'antiquité), en chimie, s'intéresse aux gaz et vapeurs, découvre le CO2 et une espèce d'air qui se dégage de l'action de dissolution du zinc dans l'acide. La masse, notion tirée de la physique, commence à s'imposer comme une propriété liée à la matière.

BOYLE en Angleterre (1627-1691) distingue les mélanges des combinaisons, et postule qu'un élément est un corps indécomposable.(concepts mélange/corps purs et corps pur/élément)

C'est au 18° siècle que se développe la théorie du phlogistique avec STAHL (1660-1734) qui va être le moteur d'une série de travaux qui aboutiront à sa réfutation.(Mieux vaut une idée fausse, que pas d'idées du tout ).

Le phlogistique serait contenu dans toute substance combustible et transformable par la chaleur. LAVOISIER entre autres démontrera que le phlogistique devrait avoir une masse négative et que la chaleur se dégageait de réactions avec l'oxygène de l'air.

Il faut bien comprendre, que cette idée est rendue possible par les travaux sur les gaz, et notamment la mise en évidence de l'existence de l'air par sa pression rend possible la pesée des gaz, même plus légers que l'air. Il n'en reste pas moins que rien n'impose que le phlogistique soit une matière, ni même que toute matière doit avoir une masse positive, si ce n'est le succès écrasant de la mécanique de Newton. En cela le début de la chimie est bien "matérialiste". De plus ce n'est pas une science qui se développe seule, elle est bien le produit des idées de la physique. (Ce qui permet de penser que la vision "idéaliste" n'est pas sans fondements.)

L'emploi de la pesée systématique des réactifs et des produits va, dès le début du 19° siècle, permettre d'établir les premières lois quantitatives qui vont fonder la théorie atomique.

LOI de PROUST (1801) dite des proportions définies " Les proportions selon lesquelles deux éléments s'unissent pour former une combinaison chimique définie sont dans des rapports pondéraux invariables". (On a trouvé une invariant, une "stabilité" dans le "bruit" des observations).

Fortement contestée par BERTHOLLET, elle fut définitivement admise après les travaux de BERZÉLIUS

LOI de DALTON (1804) "proportions multiples" "Lorsque deux éléments donnent plusieurs composés, les diverses masses de l'un qui s'unissent à la même masse de l'autre sont dans des rapports simples." Exemple des oxydes de Fer: On connaît, en notation actuelle, FeO et Fe2O3. Pour une même masse de Fer le rapport des masses d'oxygène dans les deux composés est de 2/3

LOI de RICHTER ( 1792 à 1807) loi des "nombres proportionnels" et notion de "Stœchiométrie", " Soient a et b les masses des éléments A et B qui s'unissent à une même masse c de C. Si A et B se combinent entre eux pour former des composés définis, les masse combinées seront entre elles dans le rapport xa et yb où x et y sont des nombres entiers". Exemple: avec le soufre, l'oxygène et l'hydrogène, il existe les combinaisons, (corps purs en notation actuelle), SO2 , H2S, et H2O. Pour une même masse de soufre de 32g on a dans SO2, a =32g d'oxygène, et dans H2S b = 2g d'hydrogène. La combinaison de ces deux derniers éléments dans l'eau donne xa = 16g d'oxygène pour yb = 2g d'hydrogène. si x = 1 = 2*16/32 y = 2 = 2*2/2. Le rapport entre x et y est de 2 ou ½.

DALTON (1808) " Les éléments sont constitués d'atomes qui restent indivisibles dans les réactions chimiques".

Il s'agit là d'une opinion et non d'une affirmation scientifique. DALTON exprime que cette idée est conforme à ce qu'il constate mais il n'existe pas à l'époque de moyens de vérifier ou d'invalider cette affirmation. Elle n'est pas "falsifiable" au sens ou le demandera en 1935 Karl Popper. C'est à dire qu'il n'existe pas une procédure expérimentale permettant de la mettre à l'épreuve du réel. Néanmoins elle va être le puissant moteur de toute la recherche du XIXème siècle.

LOI de GAY-LUSSAC (1809) "Lorsque deux gaz se combinent, il existe un rapport simple entre leur volumes mesurés dans les mêmes conditions de température et de pression. Lorsque deux gaz se combinent et que la combinaison résultante est également gazeuse, il existe un rapport simple entre son volume et celui des gaz composants".

LOI d'AVOGADRO (1811) ET AMPÈRE (1814) Reprenant le modèle donné par BERNOULLI dans sa théorie cinétique des gaz (1738), Ils pose que des volumes égaux de composés différents, pris dans les mêmes conditions de température et de pression contiennent une nombre égal de molécules.

La notion de molécule est loin d'être claire pour les contemporains et il faudra beaucoup de travaux supplémentaires et la défense de CANNIZZARO au congrès de Karlsruhe en 1860 pour que cette idée soit enfin acceptée.( délai de 49 ans).

Dès 1818 BERZÉLIUS propose l'usage des lettres pour symboliser les éléments et il ajoute à ce symbole une masse atomique (équivalent) dont il fait les mesures. D'abord il prend pour base 100g pour l'équivalent de l'oxygène puis 1 g pour l'hydrogène. Ses résultats sont étonnants de précision vu les moyens de l'époque. 

Ces mesures et cette écriture vont grandement contribuer au succès de la théorie atomique, alors que BERZÉLIUS lui-même va la refuser et la combattre. Il est équivalentiste, c'est à dire qu'il pense inutile , ou abusive, une représentation de la matière selon une forme, par des points ou des boules reliées dans l'espace, mais préfère s'en tenir à des relations mathématiques entre les masses ou les volumes des corps en réaction par le jeux des masses atomiques. C'est une position que l'on retrouvera chez les positivistes ainsi que chez les physiciens de l'école de Copenhague, plus tard, visant à s'en tenir à "l'observable" et tenant pour illusoire toute tentative de donner une "forme" à l'objet d'étude tant qu'on ne peut pas voir ou prouver la réalité de celle-ci. (Voir à ce sujet les récentes publications de R THOM).

Les points de vue à l'époque sont aussi tranchés durant tout le XIXème siècle.

"je n'admets ni la loi d'Avogadro, ni les atomes,ni les molécules, refusant absolument de croire ce que je ne puis voir, ni imaginer" (Sainte Claire Deville, 1850)

"La Science a fait trop belle la part de l'hypothèse, elle a perdu trop de temps à des discussions stériles sur l'essence des choses" (Auguste Compte, 1840)

"Elle (la théorie atomique) sert de lien entre la chimie et la physique,...Elle n'est qu'un hypothèse, mais elle offre le caractère de simplicité et de généralité qui lui assurent la vraisemblance et par la suite l'autorité, et qui en fait un instrument des plus efficaces pour la découverte des vérités scientifiques et pour l'amélioration des méthodes d'enseignement...". (A Wurtz, 1860).
 
 

En 1819 DULONG et PETIT constatent que le produit du poids atomique et de la chaleur spécifique à l'état solide est une constante voisine de 6,4 calories par mole pour de nombreux éléments. Ils en tirent une loi qui va permettre de déterminer le poids atomique des éléments existant sous forme moléculaire polyatomique (N2 ).

MITSCHERLICH en 1819 à partir de l'isomorphisme des cristaux de certaines composition chimiques va oser une règle, "Les corps isomorphes ont des formules analogues". Constatant l'isomorphisme du phosphate de sodium Na2HPO4 avec l'arséniate de sodium, il postule la formule de ce dernier,Na2HAsO4 et par dosage détermine le poids atomique de As =75

Les découvertes d'éléments nouveaux se poursuivent pendant ce temps. En 1700 on connaît environ 12 éléments. On en découvre 21 au cours du 18° siècle, 24 pendant les 50 années suivantes, 23 entre 1850 et 1899, 16 depuis cette date ( Non comptés les éléments instables transuraniens, technétium et prométhium).

Les analogies de comportement chimiques sont constatées et donnent lieu à des classements divers, plus ou moins heureux. RICHTER lance l'idée d'un classement mais ne parvient pas à conclure. De 1817 à 1829 DOBEREÏNER regroupe des Triades telles que les propriétés sont communes et le poids atomique du second est la moyenne entre le premier et le dernier. Vers 1830 une vingtaines de triades étaient identifiées.

DUMAS va élargir ce concept, abandonner l'idée de moyenne difficile à justifier et créer des familles de plus de trois éléments(1830).

1862, BEGUYER de CHANCOURTOIS met pour la première fois en évidence une certaine périodicité des propriétés des éléments en plaçant ceux-ci sur une hélice verticale, par poids atomiques croissants de bas en haut et d'un pas de 16g. Deux ans plus tard J NEWLANDS propose un tableau de 7 sur 7. Les éléments sont classés en ligne par poids atomiques croissants et tous les 7 éléments on commence une nouvelle ligne située sous la précédente. Ces deux essais ne rencontrent que scepticisme ou ironie, car trop d'exceptions se présentent sans qu'aucune ne puisse être justifiée. L'idée est néanmoins reprise par LOTHAR MEYER en 1869, qui propose un système général des éléments. Il porte sur un graphe en abscisse les poids atomiques et en ordonnée le rapport entre le poids atomique et la densité. Il obtient une courbe en dent de scie sur laquelle les éléments d'une même famille se présentent alignés.

C'est à partir de cette époque que MENDELEIEFF va proposer une classification plus audacieuse. Il (im)pose en tant que loi que:" Les propriétés des corps simples, comme les formes et les propriétés des combinaisons, sont une fonction périodique de la grandeur du poids atomique." Et donne à cette classification la forme d'un tableau.Il modifia la place de 17 éléments dont la position lui semblait erronée. "La disposition des éléments correspond à leur "valence". - Les corps simples les plus répandus sur terre ont un poids atomique faible et tous les éléments de faible poids atomique ont des propriétés bien tranchées" "Il faut attendre la découverte d'éléments simples inconnus ressemblant à Al et Si et ayant des poids atomiques entre 65 et 75 ( éka-aluminium, éka-bore, et éka-silicium).  Il permute les positions du tellure et de l'iode pour les replacer dans leur famille .

En 1875 LECOQ de BOISBAUDRAN découvre par spectroscopie, (comme l'avait prédit Mendeleïeff), le Gallium dans le minerai de zinc. 

Succès confirmé par la découverte en 1879 par NIELSEN du Scandium (éka-bore) et par WINKLER en 1886 du Germanium (éka-silicium). Mais en 1895 RAMSAY découvre les premiers gaz rares de l'air l'Hélium et l'Argon, qui n'appartiennent à aucune famille connue.

Il suffira d'ajouter une colonne au tableau entre les halogènes (F, Cl...) et les alcalins (Li, Na...) pour placer la nouvelle famille et d'attendre les découvertes à venir des gaz manquants.

RYDBERG en spectroscopie tenta un nouveau concept celui de Numéro atomique qui justifiait les irrégularités du tableau. Mais la confirmation la plus définitive vint en 1913 par MOSELEY en spectrographie de rayon X. La fréquence de la première raie ( dite K) émise par un élément est égale à Cte . où Z est le numéro atomique de l'élément, que vient de proposer Rydberg. C'est à dire le N° de la place de l'élément dans le tableau. Ceci donnait un justification expérimentale à ce dernier et établissait pour tous les scientifiques la théorie atomique.

En fait, une dernière polémique va être livrée entre atomistes et énergétistes au rang desquels OSTWALD qui fit cette intéressante déclaration à rapprocher des idées du chapitre I, "La matière est une invention que nous nous sommes forgée pour représenter ce qu'il y a de permanent dans toutes les vicissitudes. La réalité effective, c'est à dire celle qui fait de l'effet sur nous, c'est l'énergie".

Il est à remarquer que l'époque coïncide avec le début d'une autre théorie, celle de la discontinuité de l'énergie. Cette dernière va donner une telle solidité aux idées atomistes, que la nature de la chimie va s'y perdre. Car si aucune transmutation n'est possible la chimie a une existence propre, mais il va être établi, que le passage d'un élément à l'autre, bien que difficile n'est que le résultat d'une mécanique de particule, donc qu'il n'y a pas de nature de la matière, et la chimie n'est plus qu'une partie de la physique.    

Source: http://gfev.univ-tln.fr/H21/CultSci.html

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